La préméditation est retenue

ASSISES DES LANDES.  Michele Auciello a été condamné à 28 ans de réclusion criminelle hier soirLa Cour d'Assises des Landes présidée par le conseiller Laurent Tignol a condamné, après plus de 2 h 30 de délibéré, Michele Aucielle à 28 ans de réclusion criminelle, dont deux tiers de peine de sûreté, et Philippe Berque à douze mois de prison avec sursis. Le jury, cinq femmes et quatre hommes, a répondu oui aux questions sur l'assassinat avec préméditation de Jesus Rodriguez et la tentative d'assassinat également préméditée sur Alicia Rodriguez le 17 mai 1997 à Mimizan. Philippe Berque, accusé de non dénonciation de crime et recel de malfaiteur a été condamné à douze mois de prison avec sursis. Les deux hommes ont été reconnus non coupables du viol commis sur Myriam Robert.En début de matinée, après l'intervention de Magalie Mathieu (lire par ailleurs) qui signifiait la fin de l'instruction de l'affaire, Me Monique Peneau Descoubes, partie civile pour Dolorès Rodriguez et Alicia Alvarez Rodriguez, respectivement fille et épouse de Jesus Rodriguez, assassiné le 17 mai 1997 à Mimizan, avait commencé la série des plaidoiries. L'avocate montoise ne fit aucun cadeau en ce qui concerne le pénal. Me Peneau Descoubes, dans une intervention concise mais très concentrée, exprima la douleur des victimes. « L'assassin c'est lui. Pour moi la préméditation ne fait aucun doute et tout ce qu'il trouve comme justification aux mauvais traitements infligés à sa compagne Dolorès c'est : "Elle était têtue comme un bourricot". Et voilà le motif des dents cassées et des coups de marteau sur la tête ! Me Peneau Descoubes rappela aussi que dès que quelqu'un lui résistait il passait à l'acte d'une manière froide et organisée.« Une araignée ».  Le terrain était donc préparé pour l'avocat général Jean-Pierre Laffite, qui avait parfaitement préparé son dossier et bien manoeuvré tout au long de quatre jours d'audience. « J'attendais de sa part une défense cohérente et un minimum de finesse et nous n'avons eu droit qu'à un discours frustre et répétitif. Pour moi Auciello est comme une araignée qui tisse sa toile. Tout son entourage vient se prendre dedans et à partir de là, il les manoeuvre à sa guise. Ici même dans ce prétoire, il a voulu jouer les dominateurs. Avec moi, ça ne marche pas. Après avoir avoué dans un premier temps il a inventé non pas une autre thèse mettant en cause Philippe Berque présent à ses côtés dans le box, mais trois thèses. Puisque finalement on s'aperçoit qu'il a mis en cause Magalie Mathieu. »Lui aussi a parlé du terrible enfer vécu par l'entourage de l'accusé. De la panique qu'il a déclenchée auprès de ses relations. Des coups distribués.Au sujet de Philippe Berque, l'avocat général a été beaucoup plus nuancé. Il estime que le viol pour lequel il est poursuivi ne mérite pas qu'on s'y attarde dans la mesure oú la victime n'a pas porté plainte, n'a pas fourni de certificats médicaux et que les circonstances de l'acte demeurent bien obscures. Par contre, le représentant du parquet a regretté que la scène de la forêt oú Myriam Robert a été blessée au visage d'un coup de pistolet à grenaille par Auciello et sur laquelle Philippe Berque a tiré par deux fois avec un pistolet déchargé n'ait pu être jugé, les faits étant prescrits.Au terme de ses réquisitions Jean-Pierre Laffite demanda solennellement, et c'est la première fois de sa carrière, une peine de réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de vingt ans à l'encontre de Michele Auciello et trois ans de prison dont deux avec sursis pour recel de malfaiteur et non dénonciation de crime pour Philippe Berque qui avait transporté l'accusé de Mimizan à Lille après le crime.La défense.  La tâche des défenseurs d'Auciello, Mes Frédéric Dutin et Philippe Malet, s'annonçait donc particulièrement ardue. Une drôle de partie à remonter eu égard à la déplorable impression laissée par leur client tout au long du procès. Frédéric Dutin qui s'attacha surtout à démonter le dossier expliqua dans son propos liminaire : « Auciello est insupportable depuis quatre jours. Eliminons l'agacement qu'il a provoqué chez tout le monde et Mesdames et Messieurs les jurés oubliez son comportement quand viendra l'heure des délibérés ». L'avocat ne cacha pas au jury qu'il endossait une terrible responsabilité. « Vous avez entendu des réquisitions exemplaires, qui devraient donc correspondre à un dossier exemplaire. Or, en réalité, vous allez devoir juger en vous basant sur un dossier lacunaire oú les approximations sont bien trop nombreuses ». Me Dutin critiqua sans nuance la reconstitution des faits intervenue trop tardivement et insista sur l'absence de préméditation. « Pour qualifier un crime d'assassinat il faut de la préméditation, pour moi elle n'est pas établie. D'autre part, en l'état du dossier je pense qu'il y avait deux personnes pour commettre le meurtre. Auciello doit donc être acquitté au bénéfice du doute pour la mort de Jesus Rodriguez et n'être condamné que pour tentative de meurtre sur Alicia Rodriguez. Seul ce dernier point a l'air solide dans la procédure ».Derrière lui, Me Philippe Malet s'ingénia pendant une heure et demie à redonner un peu de brillant à la personnalité de Michele Auciello sérieusement ternie depuis lundi. Philippe Malet s'attacha ensuite à banaliser le personnage : « Ni mafieux, ni membre de réseau, un petit bonhomme dont la seule légende était la légion étrangère. Une légion qu'il a quittée sans gloire avec un poignet cassé au cours d'une séance de sport ». Il termina son long exposé en lançant un vibrant appel aux sentiments humains de la cour et du jury. « Auciello est un spontané. Et la spontanéité est bien le contraire de la préméditation. Je vous fais confiance pour condamner Auciello à une peine apaisante pour la victime, rassurante pour la société et structurante pour lui. »Me Guy Debuisson pour Philippe Berque rappela, lui, que son client était sous l'influence totale d'Auciello, dépeint comme un gourou par bon nombre de ses connaissances et dont Berque était à son corps défendant le disciple. Me Debuisson considérant que si Philippe Berque avait accompagné Auciello jusqu'à Armentières c'est parce qu'il se considérait en danger de mort (Auciello était armé), il demanda donc l'acquittement pur et simple de son client. Le jury a ramené le verdict que l'on sait. 

Uncategorized