Tribunal de Mont-de-Marsan : une mamie en or
En mai 1995, à Aire-sur- l'Adour, les gendarmes effectuent une perquisition au domicile du couple L.B. Une visite providentielle qui leur permet d'une part de mettre à jour une affaire de complicité de faux et usage de faux, pour laquelle quatre personnes devaient s'expliquer hier à la barre du tribunal correctionnel présidé par Patrick Izard; d'autre part de mettre fin au traitement peu convenable infligé par le dit-couple à Olga, une personne âgée de 68 ans logée dans la maison.Le mari ne jouissant pas de toutes ses facultés, sa femme, Lisa, est seule à comparaître à l'audience pour « vol avec destruction ou dégradation, violence sur personne vulnérarable et abus de faiblesse. »Ô bien sûr, observe le président, il convient dans cette histoire de relativiser la notion de mauvais traitement apparaissant lors de l'enquête de voisinage effectuée par la gendarmerie : non, Olga n'a pas dû dîner de tomates farcies d'excréments; non, Lisa ne lui a pas administré de suppositoires à l'harissa, pas plus qu'elle n'a été retenue prisonnière. D'ailleurs dans sa déposition, la victime, décrite comme « une personne mesurée et sensée », réfute toutes ces allégations.Il n'empêche que Lisa n'a peut-être pas été non plus un ange tout à fait désintéressé, oeuvrant avec une bonté infinie pour le seul bien-être de la vieille dame. Car s'il n'y a pas eu de véritables violences ayant laissé des traces, Lisa a bien un peu « secoué » sa pensionnaire une fois ou deux, elle l'a bien un peu humiliée en la montrant sous la douche à des enfants hilares, tout comme elle l'a photographiée, souillée d'excréments. Mais, avec son mari, l'a t-elle « dépouillée » d'une partie de ses biens ? A l'audience, pour répondre à cette question, on se plonge quatre années en arrière.« LA RECONNAISSANCEDU VENTRE »Ah, qu'elle était gentille et reconnaissante et providentielle Olga, avec sa retraite confortable d'environ 10 000 francs par mois, son appartement à Biarritz, ses SICAV et ses comptes en banque ! Et que son amitié et sa solitude tombaient à pic pour la famille L.B., dont le porte-monnaie ne se garnissait chaque mois que d'une pension adulte-handicapé et de quelques allocations de la CAF. Ce pedigree méritait bien une attention particulière, une chambre, trois repas par jour et même, pourquoi pas, une amitié sincère.D'autant que la retraitée n'était pas une ingrate. N'a t-elle pas couvert le couple de cadeaux en achetant une voiture et une moto pour monsieur, un ordinateur, une chaîne haute fidélité, une télévision écran plat, un abonnement à Canal+, des meubles et bien d'autres choses encore. Encore ? 200, 1 000, 2 000, ou 9 000 francs, des virements par dizaines, dont un chiffré à 100 000 francs.« A ce rythme, vous mettiez ses comptes à sec », s'énerve le président avant d'ironiser : « Vous deviez bien vivre là-bas à Aire-sur-l'Adour. Et malgré cela, vous l'avez secouée... vous auriez au moins pu avoir la reconnaissance du ventre ! Qu'elle ait voulu vous gratifier, sans doute. Mais de là à la dépouiller. »Au total, les sommes versées au couple s'élèvent à environ 420 000 francs. Mais il ne faut pas se méprendre, se défend Lisa, entre elle et Olga, c'était presque une histoire d'amour, la preuve dit-elle à la barre, « elle voulait me faire hériter. Et puis je la soignais comme si elle était ma mère, je restais avec elle nuit et jour, elle était attachée à moi, comme j'étais attachée à elle. » Interrogée à ce propos lors de l'instruction, la vieille dame n'a jamais démenti.« UNE PERSONNE VULNÉRABLE »Il n'empêche que Martine Lafitte-Haza, au nom de la partie civile, relativise l'amitié liant la prévenue à sa cliente. « Il s'agit d'une personne fragile, seule, qui a effectué un transfert affectif. Madame L.B. était devenue sa fille, et c'est pour cela qu'elle voulait la faire hériter. En fait, on a abusé de son état de vulnérabilité », plaide l'avocat, avant de demander réparation du préjudice financier.Quant au ministère public, représenté par Sophie Leydier, il rappelle que des violences ont bien été pratiquées et qu'une somme importante a été soustraite des comptes d'Olga. Puis s'appuyant sur une expertise psychiatrique décrivant Lisa comme une personne « narcissique », ayant « des tendances sadiques », elle réclame une peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis, une mise à l'épreuve de 3 ans, l'obligation de soins et d'indemniser la victime.Mais pour Frédéric Dutin, l'avocat de la défense, le ministère public se méprend sur les intentions de Lisa, comme il se méprend sur ses responsabilités. Le seul coupable, « le fou qui casse tout », celui qui aurait « manipulé le psychiatre », et qui fut « à l'initiative du malheur de Lisa », c'est le mari « schizophrène et violent ». « Si dans ce dossier on a pu un moment penser que le couple étaient de gros salauds, des monstres abusant de la vieille dame, tout s'est dégonflé », explique t-il, avant de faire le compte des violences supposées : trois gifles, une vexation, presque rien, « une faute ». Quant à l'accusation d'abus de faiblesse, il l'a balayé, d'un revers de manche et demande la relaxe. « Olga était presque amoureuse de Lisa, elle l'a écrit, tout comme elle a écrit qu'elle avait menti aux gendarmes », puis rappelant qu'il n'y a pas dans ce dossier « une déclaration affirmant qu'elle ne voulait pas donner ces choses », il plaide la relaxe. Des arguments qui ont sans doute pesé. La prévenue a été déclarée coupable de vol et de violence, mais l'argument d'abus de faiblesse n'a pas été retenu. Elle a été condamnée à 4 mois de prison avec sursis. Quant à la partie civile, elle a été déboutée.Affaire Georges Charlet : En juin 1999, le gérant de la société Charlet Nautique, située à Biscarrosse, était poursuivi pour abus de confiance. En juin 99 Georges Charlet se retrouvait à la barre du tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan oú il était poursuivi pour abus de confiance et détournement d'emprunt. Faits remontant aux années 1992 et 1993 et pour lesquels huit clients avaient déposé plainte et s'étaient constitués partie civile. Le jugement, mis en délibéré, a été rendu hier. Le gérant a été condamné à 18 mois de prison avec sursis et 20 000 francs d'amende.