La mort d'un enfant de 4 ans en question
C'est une affaire d'infanticide sordide dont les juges et les avocats se seraient évidemment bien passés. Le 27 avril 2010, à Mont-de-Marsan, Killian, 4 ans et onze mois, avait été retrouvé décédé au domicile de ses parents. Après avoir conclu dans un premier temps à une mort naturelle, le pôle de l'instruction montois avait ouvert une information judiciaire pour violences volontaires habituelles ayant entraîné la mort. Et c'est dans ce cadre que les parents de l'enfant défunt avaient été mis en examen et placé en détention provisoire le 7 avril 2011.Si le dossier ressurgit un an après, c'est parce que les mis en cause réclament une mise en liberté conditionnelle devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau. La démarche initiée en janvier dernier par la mère de l'enfant a porté ses fruits puisque celle-ci a été libérée hier. Entendu hier matin via le système de visioconférence depuis le centre pénitentiaire Pémégnan de Mont-de-Marsan, le père demande aux juges d'adopter à son sujet la même posture de clémence.« Cet enfant n'était pas convenablement suivi et cela tout le monde le savait : le médecin traitant, la famille, les voisins »Me Frédéric DutinCertes, il y avait eu maltraitance et violences. Cela n'est d'ailleurs pas ou peu contesté par les parties. D'après les faits rapportés par le médecin légiste qui avait examiné Killian, il y avait même eu beaucoup de violences. Les parents frappaient. La grand-mère sans doute aussi. Bref, le petit Killian était sans doute condamné de longue date à un destin aussi tragique.Un acte d'« abandon » ?Le débat doit-il pour autant être exclusivement centré sur une ou plusieurs gifles assénées la veille ou l'avant-veille par les parents ? Les avocats du père ont posé la question hier devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau. D'après le rapport d'autopsie, Killian souffrait en effet de malnutrition et d'une malformation cardiaque, des maux consécutifs à une maladie génétique connue sous le nom de syndrome de Di George. « Cet enfant n'était pas convenablement suivi et cela tout le monde le savait : le médecin traitant, la famille, les voisins », dénonçait hier matin le bâtonnier de Mont-de-Marsan, Me Frédéric Dutin.Au-delà du rôle des parents et de la personnalité de ces gens marquée par des carences financières, sociales et intellectuelles, la question de la responsabilité de la mort de cet enfant ne doit-elle pas en effet être renvoyée à tout le système de la protection de l'enfance ? Si aujourd'hui les parents livrent une véritable bataille juridique - à la fois pour être libérés et à la fois pour ne pas supporter les conséquences de la mort d'un enfant qu'ils ont semble-t-il toujours rejeté -, il convient en effet de ne pas oublier que Killian était suivi par différentes instances depuis ses premiers mois. D'après les éléments rappelés par Me Dutin, il avait même été retiré à ses parents et placé dans un centre spécialisé avant de leur être remis quelque mois avant les faits sur décision du juge des enfants de Mont-de-Marsan. Un acte d'« abandon » selon le terme utilisé hier par l'avocat.Aujourd'hui sous le feu de la rampe judiciaire, les parents n'ont pas encore fait l'objet de la moindre confrontation physique. « Le pôle de l'instruction de Mont-de-Marsan attend des expertises complémentaires mais l'histoire de Killian c'est tout simplement celle du petit oiseau que les parents oiseaux laissent au bord du nid », image, de la manière la moins cruelle qui soit, l'avocat du père de l'enfant.La question de sa libération conditionnelle sera tranchée demain.